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Quelles conséquences après l’annulation d’un événement ?

Auteur de l’article
Lucile, Chargée de gestion sociale

 
 
La saison des festivals bat son plein et avec elle, malheureusement, son lot d’annulations. Quelles sont vos responsabilités si votre événement est annulé ? Quelles sont les conséquences financières ? Comment limiter les risques ?
NB : Cet article traite des cas d’annulation postérieures à la signature des contrats de travail et contrats commerciaux.

NB2 : En droit civil deux formes de responsabilités sont à distinguer selon la loi. D’une part la responsabilité contractuelle (engagée lorsque le préjudice résulte d’un manquement à une obligation prévue dans contrat) et de l’autre celle délictuelle (engagée en cas de préjudice causé en dehors de tout contrat). Ici l’on s’intéressera à celle contractuelle
 

L’annulation pour force majeure

Qu’appelle-t-on un « cas de force majeure » ?
L’article 1218 du code civil le définit ainsi : « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. »
La force majeure désigne donc à la fois un évènement :

  • imprévisible,
  • irrésistible (insurmontable),
  • échappant au contrôle des personnes concernées.

La jurisprudence a déjà été amenée à se pencher sur l’annulation d’un spectacle et la reconnaissance – ou non – de la force majeure :

  • elle a été reconnue dans le cas où des intermittents du spectacle étrangers à l’événement (festival) avaient entrepris une grève contre un projet gouvernemental, empêchant les salariés de se rendre sur leur lieu de travail, et conduisant à l’annulation du festival (arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 31 octobre 2006);
  • elle n’a pas été reconnue dans le cas où une commune française qui avait fait appel à une société pour assurer l’organisation d’un carnaval, avait décidé d’annuler quatre mois avant la tenue de celui-ci sous prétexte de “nombreuses incertitudes” tendant à la sécurité liées à un contexte de guerre à l’étranger (arrêt de la 1e chambre civile de la Cour de cassation du 14 janvier 1997)

Attention : un évènement provoqué par la défaillance de l’organisateur (incendie causé par un mauvais entretien du réseau électrique par exemple), ne serait pas reconnu comme un cas de force majeure.
L’article 1218 du code civil poursuit : Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »
Ainsi une annulation pour cas de force majeure, si elle est confirmée par les tribunaux en cas de litige, dégage l’organisateur de sa responsabilité et le délie de ses engagements contractuels. Il ne sera pas tenu de respecter les engagements portés aux contrats concernant les cas d’annulation. 

Attention cependant, en cas de rupture d’un contrat de travail à durée déterminée (CDD) pour cas de force majeure, le salarié a droit au versement de l’indemnité compensatrice de congés payés. Si la rupture est la conséquence d’un sinistre, il perçoit également une indemnité égale au montant des rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat. La prime de précarité n’est pas versée.
 

L’annulation du fait de l’organisateur

La tuile : vous devez annuler votre évènement. 
Vous pensez peut-être que vous n’êtes pas responsable, que l’annulation est la conséquence de faits extérieurs. Mais, s’il n’y a pas force majeure, alors vous êtes tenu pour responsable de l’annulation, et êtes par conséquent la partie défaillante au contrat. 
Nous pouvons citer en exemple des annulations pour cause de :

  • prévision de recettes insuffisantes ;
  • intempéries pour un spectacle joué en plein air ;
  • défaut d’autorisation d’ouverture du site par la Commission de sécurité ;

Quelles sont alors vos responsabilités ?
 

Au regard des salariés

Suite à l’annulation de l’évènement, vous ne pouvez honorer vos engagements envers vos salariés engagés en CDD pour l’occasion : CDD pour accroissement temporaire d’activité ou CDD d’usage (intermittents du spectacle, extras).
Cependant, un CDD peut être rompu de manière anticipée dans les cas suivants uniquement :

  • Rupture pendant la période d’essai, à condition de respecter le délai de prévenance ;
  • Accord entre l’employeur et le salarié ;
  • Faute grave ;
  • Force majeure (cf I.) ;
  • Inaptitude constatée par la médecine du travail ;

Le cas ici échappant à l’un de ceux précités, alors la rupture doit s’assortir du versement d’indemnités par l’employeur au salarié dont le montant est au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, incluant l’indemnité de fin de contrat ou indemnité de précarité.
 

Au regard des prestataires

Si vous organisez un évènement culturel ou un festival, vous faites nécessairement appel à des prestataires de services : producteurs de spectacles, prestataires techniques, restaurateurs… avec lesquels vous signez un contrat commercial. 
Le contrat est un engagement réciproque entre deux ou plusieurs personnes, et il fait naître entre elles des droits et obligations. Il détermine également les conditions de leur relation et de la délivrance de la prestation qui en est l’objet.
 
Les contrats de prestation de service conclus entre un prestataire et un organisateur d’évènements culturels sont, dans la majorité des cas, des contrats à durée déterminée. Ils ne peuvent donc, hors cas de force majeure, ou commun accord entre les parties, être rompus avant leur terme.
La partie défaillante au contrat (celle qui ne peut l’honorer pour une raison autre qu’un cas de force majeure) est responsable envers l’autre partie. Elle devra donc, en cas de résiliation anticipée, honorer les termes de la clause de résiliation prévue au contrat.
Cette dernière peut prévoir le versement d’une indemnité financière qui pourrait être égale au montant de la prestation, voire plus.
Une clause pénale peut également avoir été prévue entre les deux parties dans le contrat : cette clause permet l’indemnisation de l’une par l’autre en cas d’inexécution du contrat.
 

L’annulation du fait d’un tiers autre que l’organisateur

Vous êtes contraint d’annuler votre évènement du fait de la défaillance d’un ou plusieurs de vos salariés ou prestataires.
 

Défaillance d’un salarié

Un de vos salariés essentiel à la bonne tenue de votre évènement (artiste principal, régisseur général par exemple) ne peut honorer son contrat de travail, vous êtes contraint d’annuler. Qui paie ?
En réalité tout dépend du cas de figure. Pourquoi votre salarié n’est pas là ?
 

Il est malade ou décède 

Si votre salarié est arrêté pour maladie, il doit vous adresser l’arrêt de travail délivré par le médecin dans les 48 heures. Vous pouvez, en cas de doute, demander un contrôle par le médecin conseil de l’assurance maladie.  
A noter, la maladie n’interrompt pas le contrat de travail, elle le suspend.
Le décès de votre salarié entraîne la rupture automatique du contrat de travail.
Hormis si vous êtes assuré contre ces risques (cf. article V), vous n’avez aucun recours. 
 

Il fait face au décès d’un proche

Des dispositions conventionnelles précisent le nombre de jours d’absences auxquels a droit le salarié en cas de décès d’un proche. À défaut de convention collective, accord collectif, accord de branche ou d’entreprise, le salarié bénéficie d’un nombre minimal de jours.
La durée du congé varie en fonction du statut de la personne décédée par rapport au salarié. Il doit alors vous fournir un justificatif.
Comme pour la maladie, si vous n’êtes pas assuré contre ce risque (cf. article V), vous n’avez aucun recours.
 

Il est absent sans motif 

Nous l’avons vu précédemment la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée n’est autorisée que dans certains cas précis. Si la rupture est à l’initiative du salarié ces cas sont les suivants : 

  • Rupture de la période d’essai, à condition de respecter le délai de prévenance ;
  • Accord entre l’employeur et le salarié ;
  • Demande du salarié qui justifie d’une embauche en CDI, à condition de respecter un préavis.

 
En dehors des cas autorisés, si le salarié rompt le CDD par anticipation, il doit verser à l’employeur des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi, dont il faudra apporter la preuve.
 

Défaillance d’un prestataire

Un de vos prestataires essentiel à la tenue de votre évènement est défaillant (prestataire technique, tête d’affiche par exemple).
Comme nous l’indiquions précédemment, la partie défaillante au contrat est responsable envers l’autre partie. Elle devra donc, en cas de résiliation anticipée, honorer les termes de la clause de résiliation prévue au contrat. La prestation ne sera évidemment pas payée, mais le prestataire pourrait être tenu de vous verser des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Ici encore, une clause pénale peut prévoir une indemnisation en cas d’inexécution du contrat de la part de l’une des parties.
 

Quelle est votre responsabilité envers le public

D’un point de vue juridique, le billet est un contrat entre un organisateur et un spectateur. Il comporte des mentions facultatives inscrites au dos d’un billet (billetterie matérielle) ou portées à la connaissance du spectateur par tout autre moyen (billetterie dématérialisée). Ces conditions visent à limiter la responsabilité de l’organisateur.
Toute modification substantielle du spectacle, non précisée dans les mentions facultatives, signifie que l’organisateur ne remplit pas son contrat. Il doit alors rembourser le spectateur si celui-ci le souhaite (il doit en faire la demande, le remboursement n’étant pas automatique). 

En revanche, certaines annulations ne conduisent pas systématiquement à un remboursement intégral du billet. Il faut alors se reporter aux mentions facultatives.
Par exemple : interruption d’un spectacle en cours pour des raisons techniques, climatiques ou de sécurité ; annulation d’un des artistes programmés dans un festival.
 

Et les assurances dans tout ça ?

On l’a vu, une annulation peut coûter très cher à un organisateur, même s’il n’en est pas lui-même responsable. C’est alors que les assurances entrent en jeu.
Il est essentiel pour un organisateur de bien assurer son évènement contre les risques encourus. Inutile par exemple d’assurer son évènement en intérieur contre les intempéries. 
Sachez que plusieurs risques peuvent être couverts par les contrats d’assurance annulation : 

  • Force majeure,
  • Intempéries,
  • Indisponibilité de personnes (précisément nommées dans le contrat),
  • Destruction ou détérioration des locaux,
  • Attentat ou menace d’attentat […]

A noter, le risque d’annulation pour cause de vente de billets insuffisante est généralement exclu des contrats d’assurance.
Nous vous conseillons de bien négocier votre contrat d’assurance en amont et d’être très attentif à toutes les clauses. N’hésitez pas à demander conseil à votre assureur.
 

Conclusion

L’annulation d’un évènement peut être lourde de conséquences et notamment financières. Elle peut aller jusqu’à mettre en péril la structure organisatrice dans son ensemble.
C’est pourquoi il est important d’avoir quelques éléments en tête : 

  • envisager la bonne faisabilité du projet,
  • prévoir un budget prévisionnel,
  • prendre en compte les éléments susceptibles de nuire à la bonne tenue de la manifestation (période, lieu, concurrence, ordre public…),
  • et surtout bien s’assurer contre les risques potentiels d’annulation (au-delà évidemment des risques matériels ou de responsabilité civile).
  •  

Il est temps maintenant de profiter de l’été et de ses nombreux festivals !
 

 

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